Pêche à pied récréative

Profondément ancrée dans l’identité littorale de nombreux territoires bordant l’Atlantique et la Manche, cette activité populaire qui allie détente et plaisirs gastronomiques, est pratiquée par plus de deux millions de personnes en France. La pêche récréative maritime est encadrée afin de protéger les milieux littoraux qui restent fragiles. En maints endroits, la pression de la pêche a modifié les équilibres, amenant parfois des interrogations sur la pérennité de cette activité.

La pêche récréative est une activité regroupant une grande variété de techniques visant à la collecte de nombreuses espèces. Les différents types de pêche à pied présentent des difficultés de pratique plus ou moins grandes. Certaines nécessitent une bonne expérience et une connaissance approfondie de l’estran, alors que d’autres sont facilement accessibles aux débutants. 

Contexte et définition de la pêche récréative

La pêche à pied peut se définir par l’ensemble des techniques de pêche qui sont pratiquées sans l’emploi (ou l’emploi accessoire) d’une embarcation sur le rivage et sur les rochers et îlots, par des pêcheurs se déplaçant essentiellement à pied. Cette définition se réduit à la pêche s’effectuant sur la grève ou estran, à marée basse et exclue la pêche à partir du bord à la ligne ou au filet jeté.

En droit français, la pêche à pied de loisir n’est pas définie spécifiquement, mais trouve sa source dans l’articulation de deux définitions :

La Pêche maritime de loisir

La pêche maritime de loisir est d’abord définie par son caractère non commercial (loisir), dont le produit est destiné à la consommation (ou l’usage) exclusif du pêcheur et de sa famille.

Elle s’exerce sur le domaine public maritime et sur la partie des fleuves, rivières ou canaux où les eaux sont salées en application de l’article R. 921-83 du Code rural et de la pêche maritime.

Toute pêche à pied exercée par un pêcheur non professionnel dans un but de revente est qualifiée de pêche à pied commerciale à titre non-professionnel et est interdite, quelles que soient ses conditions d’exercice (engins, dates, etc.).

La pêche à pied

Elle se définie comme une action de pêche proprement dite qui s’exerce sans que le pêcheur cesse d’avoir un appui au sol et sans équipement respiratoire permettant de rester immergé, ceci en application de l’article D. 921-67 du Code rural et de la pêche maritime

Est donc considérée comme pêcheur à pied récréatif toute personne qui, présente à marée basse sur l’estran, prélève coquillages, poissons, algues ou crustacés pour sa consommation personnelle ou celles de ses proches, sans intention de revente, ou encore les pêcheurs d’appâts et les ramasseurs d’algues.

A l’inverse, sont exclus les pêcheurs à la canne du bord (leurre manié, surf casting) et les pêcheurs posant à pied des engins dormants sur l’estran (palangre, filets calés, casiers)

Une activité pratiquée sur le domaine public maritime

La pêche à pied récréative est une activité qui, en Atlantique et en Manche, se pratique principalement en zone intertidale (zone de balancement des marées), autrement appelée estran.

Il existe plusieurs typologies des estrans, basés le plus souvent sur le type de substrat et l’exposition au courant. Ces deux facteurs conditionnent la constitution des communautés benthiques et donc la présence ou l’absence des espèces habituellement recherchées par les pêcheurs à pied.

L’estran, zone de balancement des marées, étant situé sur le Domaine Publique Maritime, la pratique de la pêche à pied y est donc libre et gratuite.

La capture d’animaux marins, exercée à titre récréatif, devrait être sans incidence forte sur les espèces ciblées puisque le Code rural et de la pêche maritime en interdit la vente, prévenant ainsi des prélèvements excessifs.

Un réglementation modérée

L’activité de pêche à pied connaît une augmentation modérée du nombre de pratiquants mais surtout une modification des pratiques. De manière simpliste, on peut distinguer deux raisons principales :

  • Le contexte économique difficile qui rend le ressource gratuite de la pêche à pied intéressante
  • Le développement du tourisme sur cette activité

L’équilibre qui s’instaure entre le renouvellement de la ressource et le prélèvement par l’homme dans le contexte d’une activité traditionnelle est fragile. Il semble y avoir, de manière générale sur le littoral français, un épuisement des ressources et une diminution de la biodiversité.

La réglementation de la pêche à pied de loisir est assez dispersée et son appréhension peut être laborieuse par les plaisanciers. Les principaux textes tentent de rassembler et synthétiser les différentes mesures existantes. On peut noter que les règlements applicables aux marins pêcheurs professionnels le sont aussi aux pêcheurs de loisir en ce qui concerne les engins de pêche, les modes et les procédés, zones et périodes, interdictions et arrêts de pêche.

Le principe de liberté de pêche

La liberté de pêcher en mer est en France un principe ancien du droit et qui a existé dès l’époque romaine. La mer et son rivage sont considérés par le droit naturel comme bien commun (res communis) à tous les hommes.

Le texte fondateur sur cet aspect est l’ordonnance de la marine de 1681, dite décret « Colbert », qui a affirmé que la pêche est un bien commun de la nation :

Déclarons la pêche de la mer libre et commune à tous nos sujets auxquels nous permettons de la faire, tant en pleine mer que sur les grèves, avec les filets et engins permis

Ce principe a été plusieurs fois réaffirmé dans la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral dite « Littoral » qui prévoit que :

L’usage libre et gratuit par le public constitue la destination fondamentale des plages au même titre que leur affectation aux activités de pêche

Pour autant, afin d’assurer la permanence de cette liberté de pêche, les législateurs ont pris nombre de réglementations pour prévenir les abus qui pourraient diminuer l’abondance du poisson, empêcher l’accès à l’activité ou limiter l’usage à des cercles trop restreints de personnes.

Pour ce faire, ont été instaurés des principes du droit des pêches, qui ont pu être plus ou moins appliqués au cours de l’histoire en fonction des contextes politiques et économiques, encore en vigueur actuellement.

Une liberté encadrée

La pêche à pied de loisir est soumise aux dispositions réglementaires internationales, communautaires et nationales qui s’appliquent aux pêcheurs professionnels en ce qui concerne la taille minimale des captures autorisée, les caractéristiques et conditions d’emploi des engins de pêche, les modes et procédés ainsi que les zones, périodes, interdictions et arrêtés de pêche.

Une réglementation européenne

Au plan européen, le règlement européen n°850/98 du 30 mars 1998 visant à la conservation des ressources de pêche par le biais de mesures de protection des juvéniles d’organismes marins vise notamment à « assurer la protection des ressources biologiques marines ainsi qu’une exploitation équilibrée des ressources de pêche conformes aux intérêts tant des pêcheurs que des consommateurs »

Une réglementation nationale

Au plan national, la plupart de la réglementation est prise par décrets et arrêtés ministériels (notamment les questions de taille), complétée et affinée aux échelons locaux par des arrêtés préfectoraux.

Ils concernent la qualité des prises (aspects sanitaires), les quantités pêchées, ainsi que les périodes, zones et modes de pêche autorisés. Les préfets prennent des arrêtés locaux en application de ces textes et relatifs à l’interdiction de certaines zones pour raison sanitaire.

Les interdictions de pêches concernent notamment :

  • Les tailles, quotas et outils de pêches
  • La protection des ressources et de la biodiversité
  • Des raisons sanitaires

Le Code rural et de la pêche maritime énonce les principales règles en la matière suite à la codification du décret du 21 décembre 1999 relatif à l’exercice de la pêche maritime de loisir et du décret du 11 mai 2001 réglementant l’exercice de la pêche maritime à pied à titre professionnel, complété par des textes spécifiques :

  • Arrêté du 15 janvier 2018 modifiant l’arrêté du 26 octobre 2012 déterminant la taille minimale ou le poids minimal de capture des poissons et autres organismes marins (pour une espèce donnée ou pour une zone géographique donnée) effectuée dans le cadre de la pêche maritime de loisir 
  • Les arrêtés préfectoraux

En ce sens, certaines zones sont interdites à l’exercice de la pêche à pied de loisir à l’échelle nationale :

  • Les ports de pêche et de commerce pour toutes les espèces, sauf dérogation
  • Les cantonnements de pêche, interdisant toute pêche, celle d’un groupe d’espèce ou certains engins selon la réglementation de l’arrêté créant le cantonnement
  • Les concessions de cultures marines, pour l’espèce ou les espèces concernées par l’acte de concession et le cahier des charges (la pêche des algues est interdite pour tous les types de concessions sans autorisation expresse)
  • Les zones de productions conchylicoles classées C pour un groupe d’espèces
  • Certaines réserves naturelles ou parcs nationaux selon le décret ou l’arrêté de création de ces espaces

La pêche des espèces protégées est interdite ou dont les stocks sont en déclin et des arrêtés définissent des tailles minimales de captures pour certaines espèces.

En outre, afin de lutter contre la revente du produit de la pêche non professionnelle, certaines espèces ramassées en pêche à pied doivent être marquées par l’ablation d’une partie de leur nageoire caudale

Les contrevenants aux dispositions de ces arrêtés s’exposent à des poursuites pénales et à des sanctions administratives prévues par le code rural et de la pêche maritime. Des sanctions spécifiques sont également prévues comme une dégradation volontaire et importante de l’estran qui constitue un délit de grande voirie.

Une charte de bonne conduite

Afin de sensibiliser les pratiquants aux enjeux environnementaux de leurs pratiques, les principaux acteurs de la pêche de loisir ont signé le 7 juillet 2010 une charte pour une pêche de loisir écoresponsable.

Cette charte a inauguré une collaboration inédite entre les amateurs de pêche récréative et les autorités pour une meilleure préservation des ressources halieutiques et des écosystèmes marins.

Par ailleurs, depuis le 1er juillet 2012, le ministère chargé de la mer a ouvert un site de déclaration d’activité sur Internet. Cette déclaration volontaire et gratuite permettra à chaque pratiquant de recevoir une information sur la réglementation nationale en vigueur et les sanctions potentielles en cas d’infraction, la sécurité et les bonnes pratiques, comprises comme celles qui assurent la pérennité des ressources et des écosystèmes marins et littoraux.

En se déclarant, le pêcheur de loisir s’engagera à respecter ces bonnes pratiques.

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